Alexis BUCHAGIAR
Texte de
Janvier 53
Chasse
dans la Montagne
En 1950, j’habitais dans l’ Aude sur le penchant Ouest de la
Montagne noire dans une belle ferme,
mais en pleine brousse. Tout prés de la ferme, nous avions un
jardin. Et pourtant impossible de
récolter seulement une feuille de chou. Les lapins nous rongeaient
les plantes jusqu'à ras de terre.
Il fallait à tout prix remédier à cet ennui.
Alors, j’ ai commencé par fabriquer quelques collets. Je les ai
placés dans les passages qui menaient
au jardin. De plus, un vieux piège que j’ avais découvert dans le
grenier m’avait paru formidable.
Je l’ai tendu aussi, comme les collets. Maintenant, il ne restait
plus qu’a attendre.
Le lendemain, au petit jour, je suis allé voir ce qui s’était passé. Je me suis dirigé vers le bruit de ferraille.
Ah ! En voilà un ! D’un bond, je pénètre dans le jardin.
Le lapin saute de plus belle avec le piège..
J’ai ouvert la barrière du jardin…. J’ ai entendu un bruit.
Au moment où je
vais mettre la main dessus pour le saisir, il fait un suprême effort,
se dégage,
bondit dans la haie et disparaît.
En voilà un qui n’aura plus envie de goûter aux choux dis-je tout
haut ! Dans le piège reste une moitié
de patte. Je me dirige vers les collets. Il y a cinq lapins de pris
et les six autres collets sont cassés.
J’ ai répété cette manœuvre pendant une huitaine de jours, et enfin,
nous avons pu planter et
récolter sans dommage
Alexis
BUCHAGIAR
Sandygate, le 31 décembre 1952,
Cher camarade,
On s’était
bien amusé le jour ou Madame Ravier avait prédit un enfant et le
mariage à la jeune fille
de Madame Durant.
Eh bien, à
présent, c’est plutôt triste. La jeune fille a eu un enfant. Sa mère
voulant sauver son honneur
avait l’ intention d’ abandonner cet enfant à l’assistance, mais la
brave fille ne voulait pas.
Alors sa mère la renvoya de chez elle.
A présent,
elle est chez le père de l’enfant. Ils se sont mariés voilà un mois
et demi. Je suis allé les
voir ces jours-ci. Elle et lui sont heureux comme deux poissons dans
l’eau avec le petit Jacquy.
Alexis BUHAGIAR
1
ère A. Horlogerie
Texte de janvier 1954
Souvenir
de l’ occupation
Comment je fus
ramassé dans une rue de Paris pendant la guerre ? Comment je fus
emmené
avec les autres enfants en Allemagne.
J’avais à peu
près 9 ans, mon père était interné. Je ne me souviens que par bribes
de ces souvenirs.
1943 ? 1944 ?
il y a 10 ans !
Pour mémoire
Schwarz-Walo !
comme disent les gens, j’en ai quelques souvenirs comme d’ une région
de mon enfance.
Celui qui me frappe le plus aujourd’hui encore c’ est l’amitié
qu’avait pour nous une «sœur» allemande.
Elle nous considérait comme ses enfants.
Les jeudis, si j’ai bonne mémoire, ce qui se disait là-bas
Donnerstag, nous allions avec la sœur dans la
neige escaladent les rudes pentes. Elles aboutissaient dans la forêt
de sapins, ou j’ aimais tant aller voir
les cerfs. J’admirais leur élégance et leur rapidité. J’ étais
content de voir aussi d’autres animaux,
comme des sangliers par exemple.
Nous faisions des bonhommes de neige et notre sœur organisait des
jeux. Le soir nous rentrions
épuisés et heureux, chantant à tue-tête. L’ écho nous répondait dans
ces profondeurs noires des sapins.
Un de ces chants m’est resté jusqu’à présent, c’est « Hansen
K…(petit ….)
Alexis
Buchagiar
Texte de
Janvier 1954
C’ est un
petit garçon qui s’appelle Jean, qui s’ en va dans le grand monde
avec un bâton à la main et un
chapeau sur la tête, mais sa maman pleure de ne plus voir son petit
Jean.
Son petit revient beaucoup plus tard, devenu un grand garçon, maman
est heureuse, son petit Jean aussi.
C’est là que l’on se rend compte de ce qu’est une maman.
Vint un jour, celui de la libération, des soldats sont venus, m’ont
donné beaucoup de bonnes choses à
notre sœur aussi.
Mais un jour, peu avant mon départ, des soldats l’avaient enlevée,
j’avais le cœur gros. Je me disais elle
est peut être tombée malade et les soldats vont peut être la
soigner.
L’avant-veille
de mon départ, je voulais la voir, j’ avais entendu dire qu’elle
était transférée dans une autre
maison, où les soldats l’avaient emportée. J’y suis allé. Elle était
couchée, blanche comme la mort.
Elle m’a pris dans ses bras et pleurant elle m’a dit : tous ces
soldats vois-tu sont de vilains garçons.
Toi, il faut que tu sois plus tard un soldat qui honore sa patrie.
La victoire est peu de chose auprès d’une
âme pure. Je vous ai tous
considérés comme mes enfants et je veux
que plus tard vous donniez le bon
exemple.
Je n’ai
pas connu beaucoup d’allemands. Je cherche avec mes souvenirs à me
faire d’eux une idée.
Alexis
Buchagiar